Au cours d’une intervention chirurgicale d’orthopédie-traumatologie, lorsqu’un Dispositif Médical Implantable (DMI) est déstérilisé, non implanté, et non restérilisable, celui-ci est dit « jeté ». Il s’agit d’une perte financière pour l’établissement. Pour des raisons de coût ou de spécificité, le Code de la Sécurité Sociale prévoit le remboursement de certains DMI (dits « hors GHS ») sous conditions. Afin d’en permettre le réapprovisionnement sans l’associer à un patient ni en demander le remboursement, l’implant jeté est tracé informatiquement. Les données économiques liés à ces implants jetés ne sont aps connus en France, aussi nous avons mené une étude rétrospective afin : 1) d’évaluer la proportion et le montant des DMI tracés « jetés », 2) d’identifier les éléments en lien avec le contexte chirurgical influençant la proportion de DMI jetés.

Des éléments du contexte chirurgical (type d’activité, spécialité de l’implant, statut du chirurgien, période de l’année) peuvent de manière indépendante aboutir à la non implantation d’un DMI ?

Nous avons conduit une étude observationnelle rétrospective de données collectées prospectivement à partir de la base de données du Centre Hospitalo-Universitaire sur l’année 2016. Le critère principal d’évaluation était la proportion de DMI tracés « jetés ». Le second critère d’évaluation était le coût moyen par DMI tracés « jetés ». Ces critères ont été mesurés sur l’ensemble des DMI d’orthopédie-traumatologie tracé dans ce bloc puis pour chaque élément d’hypothèse pouvant aboutir à la non implantation. L’analyse a d’abord été descriptive puis comparative.

Vingt-neuf mille et soixante treize DMI ont été tracés (3 761 180€), dont 1995 DMI tracés « jetés » (6,9 %). Le montant total des implants jetés était de 179 193€ (4,8 % du montant total). Quatre cent-trente DMI hors GHS ont été tracés « jetés » (4,4 %) pour un montant moyen de 293,1€ contre 1565 DMI intra GHS (33,9€). La traumatologie était significativement plus pourvoyeuse d’implants jetés que l’orthopédie (1135 vs 860 (p<0,01)), pour un montant plus faible (59,2€ vs 130,1€ (p<0,01)). Les implants d’ostéosynthèse étaient plus jetés que les implants de ligamentoplastie ou d’arthroplastie, pour un montant moyen inférieur. Il y avait plus de DMI jetés au cours des poses de prothèses de hanche par rapport aux autres prothèses. Les chirurgiens les moins expérimentés ont jetés plus souvent (1087 vs 905 (p<0,01)) mais pour un coût moindre (69,2€ vs 114,8€ (p<0,05)). Lors des périodes de changement d’internes, il y a eu une augmentation de la proportion de DMI jetés par rapport aux autres périodes de l’année (772 vs 1223 (p<0,01)).

Cette étude a permis de quantifier pour la première fois le nombre et le montant des DMI jetés en orthopédie-traumatologie dans un service hospitalo-universitaire. La traumatologie est plus pourvoyeuse d’implants jetés tandis que l’impact financier est plus important en orthopédie. Le chirurgien, de par son expérience et ses missions d’enseignement, a un rôle déterminant dans la gestion des pertes financières.

IV, étude rétrospective.